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Feux de forêt : à quoi s’attendre et comment s’adapter ?

Aquitaine, Ile-de-France, Bretagne… plus aucune région en France n'est épargnée par le risque d'incendie en raison du changement climatique. Que prévoient les climatologues ? Quelles solutions à court et long terme ? Le point sur les constats et possibilités d’action.

50 %

des forêts métropolitaines

soumises au risque d’incendie dès 2050, contre un tiers actuellement (source : Mission interministérielle changement climatique et extension des zones sensibles aux feux de forêts).

7 084

feux de forêts

déclarés entre le 1er janvier et le 15 août 2022 contre 4000 feux par an en moyenne lors de la décennie 2007-2018 (ministère de l’Intérieur et des Outre-Mer).

+ 80 000

hectares de forêts brûlées en 2022

Comprendre

Comment le changement climatique aggrave le risque incendie

Un climat plus chaud favorise les feux de forêts

Dans 9 cas sur 10, l’activité humaine est la cause qui déclenche un incendie. Qu’il s’agisse d’une activité économique (chantiers de BTP, activités agricoles...) ou du quotidien (mégots de cigarettes, barbecues, feux de camps… ). Mais les conditions météo ont une grande influence sur la propagation et l’intensification des feux de forêt.

  • Des températures plus élevées favorisent la transpiration des plantes et la baisse de l’eau contenue dans les sols. La végétation s'asséchant, elle devient plus sensible au développement des incendies.
  • Dans certaines régions, le changement climatique devrait aussi entraîner une diminution des pluies durant l’été, saison propice aux incendies, aggravant le phénomène. C'est le cas de tout le bassin méditerranéen, définie comme un « hotspot » du changement climatique dans le dernier rapport du GIEC.
  • Des hivers plus chauds favorisent les attaques de parasites (insectes et champignons), jusque-là détruits ou affaiblis par les gelées. Ces attaques génèrent du bois mort, qui constitue un important stock de combustibles pour incendies.
Climat et incendie, un cercle vicieux ?

Les feux sont à la fois une conséquence du réchauffement climatique mais aussi, une cause. Ils contribuent à rejeter des tonnes d’émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère qui vont à leur tour accentuer la hausse du climat.

Évaluer le risque incendie avec l’Indice forêt météo

L’Indice Forêt Météorologique (IFM) utilisé par Météo France caractérise la propension d’un feu de forêt à s’aggraver et à se propager sous l’influence des conditions météorologiques. Plus sa valeur est forte (supérieur à 40), plus les conditions météo sont propices aux incendies. L’IFM est calculé à partir de paramètres météorologiques : température, humidité de l’air, vitesse du vent et précipitations. Ces données permettent de modéliser l’état hydrique de la végétation et le danger météorologique quotidien d’incendie qui en découle (danger actuel et à horizon 2100).

Comment évoluent les feux de forêts en France ?

Les dernières études* de Météo-France montrent une extension dans l’espace et le temps des zones exposées au risque de feux de forêts et végétation :

  • Le danger de feux de forêts a augmenté de +18 % entre 1961-1980 et 1989-2008.
  • Ce danger progresse vers le nord, y compris dans des régions jusqu’ici épargnées. 90 départements de métropole ont été concernés par au moins un feu significatif en 2022.
  • La saison des feux s’allonge : avec un démarrage des feux plus précoce l’été et une fin plus tardive jusqu’à l’automne.
  • La saison est marquée par une intensification du danger dans les zones déjà les plus exposées et l’apparition de méga-feux.

Source* : missions interministérielles sur l’impact du changement climatique et l’extension des zones sensibles aux incendies de forêts, 2010 et 2023.

C’est quoi, un méga-feux ?
  • Comportement imprévisible et incontrôlable
  • Associé à des conditions météo extrêmes
  • S’auto-alimente
  • Vitesse de propagation supérieur à 50m/min
  • Distance de dissémination supérieure à 1km
  • Peut sévir sur tous les continents (y compris près du cercle polaire)
  • Fort impact socio-économique et environnemental

(source : Tout comprendre ou presque sur le climat, CNRS/Bon pote).

A quoi s’attendre d’ici 2050 et au-delà ?

  • D’ici 2050 : la quasi-totalité du territoire devrait être confrontée au risque de feux et 50 % des forêts métropolitaines seront soumises au risque d’incendie contre un tiers actuellement (source : Mission interministérielle changement climatique et extension des zones sensibles aux feux de forêts. .
  • D’ici 2100, certaines régions pourraient être concernées par 1 à 2 mois supplémentaires de saison feu.
  • Cette augmentation s’accompagne d’une intensification du danger. D’ici 2100, le cœur de saison (période où les jours de danger sont les plus forts) pourrait atteindre jusqu’à 1 mois, contre 1 à 2 semaines actuellement dans les zones les plus exposées.

Les zones sensibles aux incendies de forêts en 2040

Les zones sensibles aux incendies de forêts en 2040

A partir des projections climatiques de Météo-France, l’Office national des forêts établit des cartes de sensibilité potentielle des forêts à horizon milieu et fin de siècle, selon leur typologie.
 

 

Il est urgent d’agir

Quatrième pays européen le plus boisé, la France est particulièrement vulnérable au risque incendie de forêt, notamment l’été. En plus des risques pour les personnes, les incendies et méga-feux d’espaces naturels provoquent des dégâts considérables :

  • Biodiversité : ils détruisent l’habitat de centaines d’espèces et des surfaces gigantesques de forêts, dont l’existence est indispensable à l’homme (pour respirer, capter le carbone…).
  • Qualité de l’air + santé : ils émettent de grandes quantités de particules reconnues cancérigènes par l’OMS.
  • Émissions de CO2 : ils rejettent des tonnes d’émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère qui vont à leur tour accentuer la hausse du climat.
  • Pertes économiques : leurs répercussions sur les entreprises sont multiples : à la fois directement via les dommages et destructions des biens et terrains des entreprises à proximité de ces feux de forêt, la baisse des stocks de bois, et les pertes économiques pour le secteur forestier par exemple ; mais également indirectement via des coupures de courant, des difficultés de circulation, ou en dégradant l’environnement local et les paysages pour les entreprises du secteur du tourisme.

Agir

Comment adapter son territoire au risque Incendie? Aux côtés de l’État et de l’Office national des forêts, les collectivités ont leur rôle à jouer, pour prévenir les feux de végétation.

Bien identifier les risques pour son territoire

Accéder aux bases de données

  • La base de données sur les incendies de forêt (BDIFF) accessible à tous : hébergée par l'Institut national de l’information géographique et forestière (IGN), elle collecte toutes les informations nationales sur les feux de forêt (dont leur cause). Ces données sont renseignées par un réseau de contributeurs à titre déclaratif.
  • Prométhée, spécifique à la Méditerranée : dans chaque département, elle est alimentée par les services qui concourent à la prévention et la lutte. L’objectif est de disposer d’un outil statistique permettant des comparaisons, sous l’égide de l’IGN.
  • Le site Climadiag Communes, avec l’identification des risques feux de forêt en changement climatique sur sa commune.

Le territoire sous étroite surveillance

Météo-France fournit à la sécurité civile des cartes expertisées de dangers météorologiques d'incendie, dont des cartes d'Indice Feu de forêt. Chaque été, des prévisionnistes de Météo-France sont détachés auprès des autorités qui coordonnent la lutte contre les feux de forêt depuis les centres opérationnels de Marseille (Bouches-du-Rhône) et de Bordeaux.

Depuis juin 2023, Météo-France diffuse sur son site la Météo des forêts : cette carte indique le niveau de danger feux sur l’Hexagone et la Corse, à partir de paramètres météorologiques (pluie, humidité de l’air, température, force du vent, état de sécheresse de la végétation). Elle est disponible chaque jour en fin d’après-midi  pour les deux prochains jours.

Le cadre réglementaire

Informer le citoyen des risques sur sa commune

La loi du 22 juillet 1987 a instauré le droit des citoyens à être informés des risques majeurs auxquels ils sont exposés sur le territoire et des mesures de sauvegarde qui les concernent. Elle s’applique à la prévention du risque incendie de forêt. A l’échelle d’un département, le préfet recense dans le dossier départemental des risques majeurs (DDRM), le risque incendie par commune et présente les mesures de sauvegarde de l’État. Il en informe le maire dans un dossier communal.
A partir de là, le maire élabore un document d’information communal sur les risques majeurs (DICRIM) qui présente les mesures de prévention et de police et l’accompagne d’une communication (au moins tous les deux ans si la commune est couverte par un plan de prévention des risques) et d’une campagne d’affichage. Ces documents sont disponibles en mairie. Durant l’été et en période à risques, les communes et les préfectures peuvent décider de fermer l’accès à la forêt par mesure de sécurité.

Maîtriser l’urbanisation dans les zones à risques : les plans de prévention des risques Incendie de forêt

Etablis à l'échelle communale ou intercommunale, en concertation avec les communes, les plans de prévention des risques Incendie de forêt (PPRIF) visent à éviter des implantations qui peuvent être à l’origine de départs de feu et sont difficiles à protéger en cas d’incendie.
Ils délimitent des zones dans lesquelles des constructions ou des aménagements sont interdits et définissent des mesures de prévention et de sauvegarde des constructions et aménagements. Ils sont opposables aux autorisations d’urbanisme. Ils ciblent en priorité les territoires exposés à des forts niveaux de risque et pression foncière. A ce jour près de 200 PPRIF ont été approuvés (45 % en PACA, 23 % en Occitanie, 22 % en Aquitaine et 10 % ailleurs).

Mieux faire connaître et respecter le débroussaillement

C’est une obligation dans les massifs à risque désignés par la loi ou le préfet de département. Au sein de ces départements, l’obligation légale de débroussailler (OLD) s’applique pour les propriétaires d'habitation, de construction ou d'équipement de toute nature situés à l’intérieur ou à moins de 200 mètres d’un massif forestier, d’une lande, d’un maquis ou d’une garrigue. Il faut alors débroussailler sur une profondeur de 50 mètres autour ces équipements. L’obligation s’applique aussi dans les zones urbaines (zones U) des plan locaux d’urbanisme (PLU) situées dans les zones précitées.

C’est le maire qui est responsable de contrôler sa mise en œuvre ; il peut réaliser lui-même les contrôles, ou mandater des personnels assermentés comme les agents de l’ONF (Office national des forêts). Pour bien faire comprendre cette réglementation, l'ONF a établit une FAQ. De son côté, l'association des maires de France a publié le replay de son webinaire Je suis maire et je veux en savoir plus sur le débroussaillement.

Sensibiliser la population aux bons réflexes

Un feu sur deux est dû à une imprudence. Nous pouvons collectivement agir pour éviter les départs de feux, en appliquant les bons gestes au quotidien : organiser son barbecue sur une terrasse, jeter son mégot dans un cendrier, réaliser ses travaux avec étincelle loin de la pelouse sèche, et bien sûr débroussailler. Campagne d’affichages, videos… Les collectivités peuvent être des relais précieux pour sensibiliser la population aux bons réflexes à adopter. Voir à ce titre : la page web de l'ONF ou celle du ministère de la transition écologique.

Télécharger : le kit communication incendie

Documents incontournables

Politique de prévention et de lutte contre l’incendie de forêt dans un contexte d’extension et d’intensification du risque dû au changement climatique

Auteur
Inspection générale de l'environnement et du développement durable (IGEDD)
Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER)
Inspection générale de l'administration (IGA)
Dans ce premier tome, les deux missions, confiées au CGAAER, à l’IGA et à l’IGEDD et menées en commun, formulent des recommandations pour (…)

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