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Érosion du littoral : à quoi s’attendre et comment s’adapter ?

Les falaises s’effritent, les plages s’amenuisent… Avec le changement climatique et la montée des eaux, tout le littoral français est exposé à un risque accru d’érosion. Pour anticiper les conséquences de ce phénomène sur les biens et les activités, les collectivités sont amenées à adapter leurs littoraux en se projetant sur le long terme.

20 %

du trait de côte

est en recul en France soit 920 km (hors Guyane)

30 km2

de terres perdues en 50 ans

50 000

logements menacés

à horizon 2100 pour une valeur allant jusqu’à 8 milliards d’euros

Comprendre

De quoi parle-t-on ?

L’érosion côtière est la perte progressive de sédiments le long du littoral. Il s’agit d’un phénomène naturel, mais qui s’accélère avec le changement climatique. Cette érosion entraîne le recul du trait de côte (limite terre-mer) vers l’intérieur des terres. Aujourd’hui, en France, 20 % du trait de côte est en recul. En cinquante ans, cela représente environ 30 km² de terres perdues (sur la période 1960-2010) : l’équivalent d’un terrain de football tous les 4 à 5 jours.

Comment le changement climatique aggrave ce phénomène

L’érosion des côtes s’aggrave avec le changement climatique qui accentue la montée des eaux et modifie le régime des tempêtes. En cause :

  • La dilatation de l’océan. Comme la température de la mer s’élève, les molécules d’eau prennent plus de place, la mer se dilate et son niveau s’élève.
  • La fonte des glaces continentales, glaciers et calottes glaciaires : les apports en eau douce de ces fontes font monter le niveau de la mer.

La mer monte de plus en plus vite. En 30 ans, le rythme a presque doublé. Son niveau s’est élevé de 20 cm depuis 1900. Cette hausse favorise la propagation des vagues de forte énergie sur le littoral.

À quoi s’attendre d’ici 2050 et au-delà ?

D’après le Giec, le niveau de la mer continuera d'augmenter pendant des siècles. Cette montée du niveau marin n’est pas homogène sur l’ensemble du globe. Les estimations moyennes actuelles sont de l’ordre de :

  • 30 à 60 cm environ d'ici 2100 selon une hypothèse optimiste.
  • 60 à 110 cm dans un scénario pessimiste d’ici 2100.

Notre capacité à contenir le réchauffement climatique en réduisant nos émissions de gaz à effet de serre influencera ces niveaux.

Pourquoi il est urgent d’agir

Le recul grandissant du trait de côte pourra avoir localement de forts impacts socio-économiques. Avec environ 18 000 km de côtes (selon le SHOM), la France est l’un des pays européens les plus concernés par les risques littoraux. Ses côtes sont très attractives, densément urbanisées et accueillent de nombreuses activités. Ces caractéristiques la rendent particulièrement vulnérable. Environ 50 000 logements pourraient d’ailleurs potentiellement être atteints par le recul du trait de côte, d’ici à 2100 (Cerema, 2019).

Agir

Les collectivités exposées ont un rôle clé pour anticiper le recul du trait de côte. Pour prévenir ce risque, elles sont appelées à élaborer des stratégies de long terme qui combinent : recomposition du territoire, préservation des espaces naturels, actions de sensibilisation, et parfois, systèmes de protection. La loi « Climat et résilience » d’août 2021 apporte aux communes volontaires de nouveaux outils.

Identifier les risques pour son territoire

Un indicateur national de l’érosion côtière a été mis au point pour disposer d’une meilleure connaissance de l’évolution du trait de côte sur le littoral français. Élaboré dans le cadre de la stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte, il renseigne sur les évolutions passées en métropole et en outre-mer.

Découvrir : l’évolution du trait de côte de votre territoire

Le cadre réglementaire

Issue des travaux de la convention citoyenne pour le climat, la loi climat et résilience d’août 2021 fixe un cadre aux stratégies locales de gestion intégrées du trait de côte et développe des outils d’urbanisme complémentaires aux dispositifs existants, pour adapter les territoires littoraux les plus exposés. Son but ? Permettre aux communes et intercommunalités volontaires d’anticiper.

Élaborer des stratégies locales de gestion intégrée du trait de côte

Les collectivités compétentes au titre de la GEMAPI (gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations) peuvent élaborer des stratégies qui déclinent localement les principes de gestion du trait de côte. L'enjeu : s'appuyer sur le fonctionnement des écosystèmes côtiers pour gérer le recul du littoral.

Maîtriser l’urbanisme avec la loi Climat et résilience

Les collectivités volontaires sont invitées à prendre en compte les évolutions du trait de côte dans leurs documents d’urbanisme. Pour ce faire, elles identifient les zones exposées au recul du trait de côte en considérant deux échéances : l’horizon de 30 ans et un horizon compris entre 30 et 100 ans. Pour cela, elles disposent d’un appui technique et financier de l’État. Une méthodologie a été conçue par le Cerema et le BRGM, le service géologique national.

Dans les zones identifiées, elles peuvent déployer de nouveaux outils :

  • Un nouveau "bail réel d'adaptation à l'érosion côtière", en vue d'occuper, de louer ou de transformer des biens dans les zones les plus exposées. Ce bail peut être conclu pour une durée de 12 à 99 ans, selon l'espérance de vie du terrain. Ce mécanisme vise à maintenir des activités tant que les conditions le permettent, tout en prévoyant la déconstruction des biens mis à bail et la renaturation des terrains.
  • Un nouveau droit de préemption dédié à l’adaptation des territoires au recul du trait de côte, applicable dans l’intégralité de la zone exposée au recul du trait de côte à l’échéance 30 ans. Il permet également de disposer d’un prix d’acquisition tenant compte de l’exposition du bien au recul du trait de côte.
  • De possibles dérogations à la loi « littoral », au cas par cas, pour faciliter la relocalisation d’activités et d’habitats dans des espaces plus éloignés du rivage.

Le décret n° 2022-750 du 29 avril 2022 fournit la liste des communes volontaires.

Privilégier les solutions douces, fondées sur la nature

En complément du volet urbanisme, les collectivités peuvent intervenir sur le trait de côte au titre de leur compétence Gemapi (gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations). Elles peuvent ainsi déployer des solutions d’adaptation fondées sur la nature, pour aider à maintenir le trait de côte ou accompagner son recul.
Ces solutions visent à restaurer ou protéger des écosystèmes dégradés, qui forment des barrières naturelles : barres sableuses, plages, dunes et forêts dunaires, herbiers, mangroves, récifs coralliens... Un exemple ? Végétaliser des dunes permet de fixer les sédiments aux racines des végétaux. Ces solutions présentent, de plus, des co-bénéfices : maintien du paysage, amélioration de la qualité de l’eau, préservation de la biodiversité...

Opter pour les solutions « dures », en cas d’impérieuse nécessité : digues, brise-lames, épis…

Les ouvrages de protection, solution « dure », possèdent de nombreux désavantages (impacts, coûts…). Ils évoquent souvent, à tort, une sensation très forte de sécurité. Ils restent cependant parfois la seule option envisageable : lorsque les enjeux sont trop importants et qu’il n’existe pas d’alternatives plus pertinentes, ou lorsqu’il s’agit de se donner provisoirement du temps, pour mettre en œuvre un projet de recomposition spatiale du territoire.

Sensibiliser les populations

Développer la culture du risque, faire connaître le risque d’érosion est essentiel. Cela peut se traduire par des actions visant à : développer les sciences participatives ou « citoyennes » (observatoire participatif du trait de côte par exemple) ; sensibiliser et éduquer le grand public et les professionnels en s’appuyant sur les organismes locaux (associations d’éducation à l’environnement, scientifiques, autres associations, etc.) ; promouvoir l’éducation à l’école.

La loi Climat et résilience renforce les obligations d'information en cas de transaction immobilière dans les zones identifiées comme vulnérables par les communes dans leurs documents d’urbanisme. Elle stipule que :

  • Les annonces immobilières doivent signaler le risque d’érosion et renvoyer vers les informations sur le recul du trait de côte.
  • L’état des risques, dans lequel figure le recul du trait de côte, doit être remis à tout potentiel acheteur ou locataire, dès la première visite.

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